lundi 29 avril 2013

Sardinades

Départ aujourd'hui pour la Sardaigne avec un groupe d'Italiens. Pourvu qu'ils ne parlent pas tous en même temps (ce qui est rare) pour que je comprenne.
Oui, ils parlent en même temps et ils rigolent aussi beaucoup.

Quant à la Sardaigne, elle n'est pas nécessairement celle qu'on croyait; peut-être plus terre que mer. Le développement du bord de mer, assez harmonieux pour ce que nous avons vu jusqu'à maintenant, est assez récent.
Les Sardes ont connu tellement d'envahisseurs (Phéniciens, Carthaginois, Romains, Arabes, Pisans et Génois, Espagnols et Catalans) qu'ils ont préféré l'intérieur de l'île, plus sûr et moins convoité. Hier, des airs de Californie et de Nouvelle-Zélande : bords de mer sauvages et calmes, du moins en cette période de l'année.
Verte et extrêmement fleurie en ce moment, la Sardaigne deviendra jaune et aride en juillet.


Avant tous ces envahisseurs, un peuple dont on sait peu de choses a vécu sur l'île entre 1 800 et 500 av. J.-C. Il a laissé ce qu'on appelle des nuraghis (plus de 7000 encore présents en Sardaigne) formés de gigantesques blocs de pierre assemblés sans mortier et servant à la fois de forteresses et d'habitations.
Et pour les amateurs, la Sardaigne compte d'innombrables murs ou clôtures de pierre.





Encore une fois, nous avons pu constater le développement non sauvage de la côté sarde. Les maisons se fondent dans le décor; rien d'ostentatoire, du moins pas encore. Des kiilomètres et des kilomètres de nature préservée, des caps qui se jettent dans la mer comme le Capo Cascia et le Capo Testa, avec ses rochers aux formes presque humaines, lessivés par l'érosion. Dix kilométres au nord, les montagnes de la Corse et Bonifacio, que l'on voyait très bien hier.




La Sardaigne, c'est beaucoup l'Italie, mais c'est surtout, je crois, la Méditerranée. La pêche, l'agriculture (élevage de moutons, de bovins et de porcs, vigne et chêne-liège - 90 % des bouchons de bouteilles de vin en Italie sont faits ici). La Sardaigne, ce doit être aussi le Sud de l'Italie, que je ne connais pas, mais je n'y ai pas vu la désorganisation et l'exubérance que l'on associe généralement au Sud. Je dirais en fait que j'y ai vu une certaine réserve, peut-être à cause du fait que les Sardes sont principalement un peuple de l'intérieur. L'exubérance, elle se trouve surtout à bord de notre autobus, où le niveau de bruit atteint parfois des niveaux saisissants.

Avec son climat presque idéal, ses plages, son agriculture prospère et sa riche histoire, la Sardaigne a des allures de petit paradis. Mais cela n'a pas toujours été le cas, à cause des invasions qu'elle a subies, bien sûr, mais aussi parce qu'elle a fait l'objet de tentatives d'industrialisation assez sauvages, surtout après la Deuxième Guerre mondiale, qui ont laissé des traces indélébiles sur l'environnement. Elle s'est bien remise depuis, si ce n'est des nombreux panneaux solaires qu'on voit ici et là, mais qui ne servent à rien par manque de fonds (l'installation était subventionnée, mais le fonctionnement ne l'est pas).


Nous avons vu hier un bel exemple de la politique tape-à-l'œil et populiste de Berlusconi. En prévision du sommet du G8 qui devait se tenir en Italie en 2009, il a fait construire un immense complexe en béton à La Maddelena, une île de la Sardaigne, pour accueillir les participants. Au dernier instant, et une fois le complexe construit, il a décidé, sans prévenir les autorités sardes, que le sommet se tiendrait plutôt près de l'Aquila, ville du centre du pays qui venait d'être dévastée par un tremblement de terre ayant fait plus de 300 morts. Il voulait ainsi montrer la résilience du peuple italien et de ses dirigeants...et faire des économies en ces temps de crise économique. Résultat : le complexe de La Maddelena est aujourd'hui abandonné aux courants d'air et le centre historique de l'Aquila n' a toujours pas été rebâti.

Un qui n'était pas tape-à-l'œil, c'est Garibaldi, dont nous avons visité la dernière demeure sur l'île de Caprera. Garibaldi a combattu toute sa vie pour ses idées républicaines et l'unification de l'Italie. Il est considéré comme l'un des pères de la nation italienne et on lui voue un véritable culte, à Caprera en tout cas où la visite se fait avec une solennité et une rigueur presque militaires. L'île en question est très préservée. On dirait que le temps s'y est arrêté le 2 juin 1872, jour du décès de Garibaldi.

Cette introduction (collective) à la Sardaigne a donc été réussie. Nous en garderons longtemps des images de mer limpide, de plages (presque) désertes, de verdure et de fleurs, de troupeaux de moutons et bovins qui donnent envie de brouter, de montagnes déchiquetées et d'une certaine paix, parfois difficile à trouver en Italie.




L'Italie sans dessus dessous (4)

Après plus de deux mois de palabres, l'Italie s'est finalement donnée un gouvernement. Fini l'austérité. Ce gouvernement mettra en place des politiques de relance visant principalement le travail et les PME; il supprimera la taxe sur la résidence principale et la hausse de la TVA qui étaient prévues pour juin. Autre mesure populaire : fin du double salaire député-ministre pour les ministres.

Cette coalition droite-gauche est le résultat direct du refus systématique du mouvement M5S de Beppe Grillo de s'allier à la gauche. Le mouvement en question a raté une occasion historique qui ne se représentera probablement plus. Il aurait peut-être dû écouter les 8,5 millions d'Italiens qui ont voté pour lui et qui étaient peut-être, de façon générale, plus favorables à un compromis. Par ailleurs, sans le mouvement en question, le gouvernement actuel n'aurait peut-être pas fait autant de place à la nouvelle génération de politiciens et aux femmes (7 ministres).

Mais l'histoire n'est pas finie, la politique italienne est toujours pleine de rebondissements et on dit beaucoup que les Italiens ont trop de passé pour avoir de la mémoire.

L'infiniment petit

Oui, j'ai expié. Entre Arquata del Tronto et Castellucio en passant par Montegallo, seulement 35 kilomètres, mais 20 de montées (dénivellé de 1 400 mètres). J'en ai vraiment bavé, la route, pas très belle, ne rendait pas, comme on dit dans le jargon français (je pédalais dans le beurre en jargon québécois). Et pas de répit, toujours la montée. Mais le principe d'un col, même s'il peut paraître par moments très très loin, est de le franchir et de se laisser sécher dans la descente. Un col, c'est un peu un désert suspendu.


 
 
Pourquoi infinement petit? Parce que c'est ainsi que je me sens quand je parcours des paysages pareils. L'infinement petit, ce ne sont pas les êtres microscopiques qui peuplent notre univers, mais nous les humains qui se voient plus grands que nature. La grandeur du paysage devrait nous rendre humbles, très humbles. Petit point qui se meut dans l'immensité. Mais pas besoin de venir en Italie pour éprouver cette sensation. Vivre sur le bord du Saint-Laurent fait le même effet. Et c'est étrange de se sentir chez soi dans un paysage aussi étranger que celui-ci. Je ne vois qu'une chose, l'homme - aussi petit soit-il - a besoin d'espace, de beaucoup d'espace.  
 
 

Castelluccio, village situé à 1 450 mètres d'altitude est bien seul sur son haut plateau (le plus grand d'Europe). Trois cols (entre 1 500 et 1 650 mètres d'altitude) constituent ses moyens de contact avec l'extérieur. L'hiver, il reste souvent isolé à cause de la neige. Fait extrêmement rare en Italie, il n'y aucun autre village visible sur des kilomètres à la ronde. Nous y avons passé trois jours mémorables et avons logé dans une auberge très sympathique (http://www.anticacascinabrandimarte.it/) tenue par une famille du village. Les parents, dans la cinquantaine, y sont nés et ont fait construire cette auberge sur l'emplacement de la ferme des parents maternels. Ils l'ont fait surtout pour leurs deux fils car, nous ont-ils dit, les jeunes n'y arrivent pas dans l'Italie d'aujourd'hui sans l'aide de la famille. L'auberge a ouvert l'année dernière après trois ans de travaux et on leur souhaite de réussir.





Le plateau est le royaume de la lentille, des petits pois et de l'épeautre. En avril-mai, c'est la période des semences. Fin juin, début juillet, les champs se couvrent de fleurs multicolores. Le spectacle est paraît-il extraordinaire et les touristes affluent. L'afflux ne dure pas et le plateau retrouve vite sa tranquillité.


Les terres appartiennent en majeure partie à une coopérative et servent aussi, bien entendu, de pâturages.








jeudi 25 avril 2013

L'arbre aux jambons

Même dans mes rêves les plus fous, je n'aurais pu imaginer  pareille merveille. Point de saison, mais beaucoup de salaison. Et à Noël, on le décore de guirlandes de saucisses et d'olives à l'ascolane (http://www.lacuisineitalienne.fr/regions/marches/recette-olives-farcies-ascolane-139.html)?
Bon, allons expier tout ça dans les cols aujourd'hui.

mercredi 24 avril 2013

Sibyllines montagnes

Les monts Sibyllins, à cheval sur l'Ombrie et les Marches, forment une imposante barrière. À gauche, le mont Vettore, plus haut sommet de la région à 2 400 mètres. Nous passons une bonne partie de la semaine dans la région, à fréquenter de petits villages haut perchés et des petites routes qui tournicotent sans arrêt. Après l'exubérance fleurale de San Pietro in Valle, nous sommes revenus en arrière dans la saison.

lundi 22 avril 2013

Oasis








Nous étions venus l'année dernière à San Pietro in Valle, monastère bénédictin du XIIe siècle converti en auberge et il n'a pas fallu longtemps pour se rappeler pourquoi nous tenions à y revenir. Enserrée dans la nature et dans les montagnes, cette abbaye est une oasis de calme. D'autant plus qu'avant-hier soir, nous étions seuls. Une seule chambre occupée sur une trentaine. Hier soir, c'était beaucoup plus occupé. Il y avait même des vedettes de cinéma.
Chaque chambre porte le nom d'un frère, mais n'a rien d'une cellule. Ou voit ainsi Frère Eusèbe en plein travail.

Pendant ce temps, sa fidèle monture l'attend dans le cloître.
 
 
 
 
Il est 18 h. Il pleut. Le vert et le rose (fleur d'un arbre appelé arbre de Judée ou de Judas  https://fr.wikipedia.org/wiki/Arbre_de_Jud%C3%A9e) dominent. Dans cette  région très accidentée qu'est l'Ombrie, les villages hauts perchés sont innombrables. Plusieurs sont abandonnés. D'autres sont devenus des villages classés parmi les plus beaux d'Italie. C'est une région très différente de la Toscane, plus fermée, plus secrète, moins exubérante où la nature est aussi plus sauvage, plus présente. On ne verra jamais un livre intitulé Umbria under the sun et c'est très bien comme ça.
 
 
 
 
 
 
 

vendredi 19 avril 2013

Environnement Italie

Ce n'est peut-être pas évident sur cette photo, mais hier il y avait une large bande de smog au-dessus d'Arezzo et à l'horizon. Au Canada, on aurait sûrement eu un avertissement de smog, mais les Italiens ne sont pas très forts sur les avertissements. Parlant d'environnement, saluons l'heureuse initiative de notre bon gouvernement fédéral d'avoir rayé le titre Environnement Canada du site de la météo canadienne (merci à Katerine et à Benoît d'avoir relayé l'information). C'est tellement plus simple ainsi, finito l'environnement. Bientôt, on n'en parlera plus. Tant qu'à y être, on pourrait laisser tomber Pêches et Océans (Transport maritime?), les Affaires autochtones (Réserve touristique?), les Affaires étrangères (Amis ou ennemis?) ou Patrimoine Canada (Royauté ou Drapeau Canada?). J'oubliais Prisons Canada au lieu du ministère de la Justice?

jeudi 18 avril 2013

Avant la renaissance...

il y a eu le printemps de la renaissance. Le Palais Strozzi à Florence y consacre une exposition. Donatello, l'auteur de cette Vierge et l'enfant, est considéré comme l'un des rénovateurs de l'art italien avec Masaccio, Brunelleschi (le concepteur du dôme de Florence), Ghiberti et Luca della Robbia. Donatello est sans doute le plus grand des sculpteurs toscans qui ont précédé Michel-Ange et certains pensent même qu'il lui était supérieur par la délicatesse du travail, la vérité des détails, l'expression du caractère et l'habileté d'exécution.



Combien avons-nous vu de peintures et de sculptures représentant la vierge et l'enfant? Probablement des centaines. Nous disons parfois à la blague qu'il s'agit d'un thème tout à fait révolutionnaire. Ce qui est révolutionnaire, toutefois, dans cette oeuvre, c'est la perspective, son réalisme et l'émotion qu'elle dégage et inspire.
Et pour en savoir plus : http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Donatello/116851

mardi 16 avril 2013

Cols en série

Ce n'est peut-être pas le bon jour pour parler d'exploits sportifs. Il faudrait peut-être parler de cruauté. Tout ce que je trouve à dire, c'est qu'elle est infinie, insondable.

La Verna, dimanche (montée de 835 mètres sur près de 20 kilomètres avec des passages à 10 % et une altitude de 1141 mètres), le Passo de la Consuma, aujourd'hui (montée de 680 mètres sur une distance de 21 kilomètres avec des passages assez difficiles et une altitude de 1050 mètres). Deux journées fastes pour le cycliste avec une température splendide et plus de 160 kilomètres. Des paysages diversifiés, des monastères, des abbayes, des églises romanes, des châteaux. Je commence à sérieusement connaître la Toscane centrale.
J'ai fait mon itinéraire d'hier un peu au fur et à mesure. Il a commencé par le train pendant une heure. Puis je me suis rendu compte que je pourrais repasser à Loro Ciuffenna et profiter d'un régal glacé (2) à l'endroit où nous nous étions arrêtés samedi dernier. Mal m'en prit. C'était fermé. Après 80 kilomètres de vélo, un arrêt-repas et crème glacée aurait été bienvenu. Je me suis bien repris plus tard dans la journée. 


 

  
 

lundi 15 avril 2013

Régal glacé

Loro Ciuffenna
Comme je suis meilleur pour la manger que pour la décrire, je me contenterai de dire que la crème glacée italienne (gelato) est vraiment bonne, même dans ses saveurs les plus bizarres (bananes, nutella et café espresso, par exemple). Avec le retour des beaux jours, les gelaterie sont bondées à partir de 17 h.; c'est un arrêt obligé sur le parcours de la passeggiata, la promenade de fin d'après-midi, à laquelle tout le monde participe, jeunes et vieux, pauvres et riches, agiles et balourds, beaux et laids. Les rues sont noires de monde. Le ciel pétant de bleu. Les martinets font leur ronde. Le soir tombe. L'Italie a survécu à une autre journée.



Samedi, nous avons visité ce village, dont les origines remontent à plus de 1 000 ans. Nous y avons vu de mémoire une des plus belles églises romanes et y avons mangé une crème glacée dans un établissement classé parmi les meilleurs du genre en Italie. Pourtant, rien de prétentieux : on stationne la voiture dans le champ entre deux oliviers. On commande et on paie (3 euros pour deux), on s'assoit à la terrasse et on mange le tout sans se salir et en regardant les autos et les tracteurs passer. Et c'est là que l'été vous saute dessus.

samedi 13 avril 2013

L'Italie sans dessus dessous (3)

Plus on nous explique ce qui se passe sur la scène politique italienne, moins on comprend et j'aimerais mieux ne plus en parler et les deux tiers des Italiens aimeraient mieux ne plus le voir, mais Berlusconi est toujours là.
À ce sujet, voici un essai de traduction d'une chronique publiée dans le magazine il venerdi et que j'ai trouvée assez percutante :

« Dans le chaos italien actuel, au moins une chose devrait être claire et elle l'est en tout cas pour moi. Le pays ne pourra jamais faire un pas en avant s'il ne se débarrasse pas de Berlusconi et du berlusconisme. Depuis 20 ans, cet homme bloque toute la société italienne et l'entraîne dans un déclin dramatique. L'Italie d'avant Berlusconi n'était certes pas le paradis, mais nous étions un pays plus riche, plus efficace, plus cultivé, plus juste et peut-être plus honnête. Après 20 ans de berlusconisme, la nation est divisée par la rancune et est incapable de réaliser la croissance et de créer des emplois. Elle a perdu l'un après l'autre les moteurs de la modernité et est toujours plus marginalisée par rapport à l'Europe et au monde, arriérée, vieille et corrompue. »
Curzio Maltese

Et il ne parle pas de la dégradation de l'image de la femme dont les médias (qui apppartiennent presque tous à Berlusconi) sont responsables (http://www.youtube.com/watch?v=a1FwvROthBk). Officiellement, ces quatre femmes s'appellent dans l'émission en question (l'Eridita que l'on pourrait comparer à l'émission le Cercle à la SRC) les professeures! Ben tiens!

Selon Machiavel (6)

Voilà que Machiavel se mêle de hockey après la défaite du Canadien 5 à 1 contre Toronto :

« Ainsi vos hommes si sages ne doivent pas mesurer l'inutilité d'un tel système [de Michel Therrien]  à une défaite unique; mais ils devraient se persuader que, comme on a été battu, on peut être également vainqueur, et que l'essentiel est d'écarter les causes de la défaite [Carey Price?]. »

vendredi 12 avril 2013

Plantée dans le décor

Sant'Eugenia. Les origines de cette petite église, qui se trouve à Bagnoro, à quelques kilomètres d'Arezzo, remontent au VIe ou VIIe siècle. Elle a survécu contre tremblements de terre et inondations et a été restaurée récemment.
Elle est un jalon d'un parcours que je fais quand je n'ai pas beaucoup de temps ou qu'il ne fait pas très beau. Des petites routes qui deviennent des chemins impraticables pour un vélo comme le mien, soit parce que le revêtement change soit parce que les montées sont brutales. C'est en quelque sorte une banlieue d'Arezzo, mais une banlieue très agricole.


Au rayon des nouvelles : les scoupitounes étaient de retour en masse hier. Beaucoup d'action dans les boisés. Beaucoup d'action également dans mon ventre depuis quelques jours. Nous sommes passés à l'eau en bouteille. Côté travail, c'est morne plaine, mais ce n'est pas encore Waterloo (http://www.2dragons.be/n6-hugo.php).
Machiavel ne s'est pas encore prononcé sur le petit dictateur coréen, Kim-Jong-un, mais ça viendra.

jeudi 11 avril 2013

La consolation des grands espaces

Ce titre n'est pas de moi et je n'ai pas besoin d'être consolé, mais ce sont les mots que j'avais en tête ce matin sur mon vélo, en direction de Castiglion Fiorentino, sur cette route en lacets où j'aime tant me retrouver.
Pour quelqu'un qui est né où l'espace domine tout, c'est un besoin indispensable de retrouver cette dimension ailleurs, qu'elle soit d'eau, de forêt ou de terre.

Il y a dans ce paysage quelques cyprès et beaucoup d'oliviers. Le matin surtout, de petits panaches de fumée s'élèvent ça et là dans la campagne. Après l'émondage des oliviers, on fait brûler les branches. Ça crépite et ça sent la bonne boucane! Et quand on revient chez soi, c'est à des impressions comme celles-là auxquelles on pense. Des odeurs, une lumière, un son.

Près de 400 kilomètres en deux semaines pour Rockquiroule et sa fidèle monture. Un bon début de saison selon moi. 

mardi 9 avril 2013

L'Italie sans dessus dessous (2)

Toujours pas de gouvernement. Pendant ce temps, l'économie périclite; l'Italie est le pays de l'Union européenne qui, selon tous les indicateurs, a subi la plus forte dégradation au cours de la dernière année, avec pour résultat qu'une tranche de plus en plus importante de la population s'enfonce dans la pauvreté. En fin de semaine dernière, un couple dans la soixantaine s'est suicidé, préférant recourir à cette solution plutôt que de demander l'assistance sociale. Les journaux sont pleins de ces histoires et de chiffres désolants sur le chômage (34 % des jeunes n'ont pas de travail, 12,3 % de la population n'a pas les moyens de se nourrir adéquatement, 38 % seraient absolument incapables de faire face à une dépense imprévue de 800 euros (1 000 $), etc.). Certaines régions de l'Italie sont plus touchées que d'autres, dont le Sud évidemment. Arezzo ne semble pas trop touchée (si on compare à il y a un an), si ce n'est que des commerces ont fermé et que le nombre de marchands ambulants et de mendiants a augmenté. Les immigrants d'origine pakistanaise et sri lankaise continuent de vendre (ou d'essayer de vendre) des fleurs et ceux d'origine africaine, des parapluies (à la moindre goutte de pluie, on les voit sortir), des kleenex et d'autres babioles, parfois avec beaucoup d'insistance. Tout ce commerce reste d'ailleurs un mystère. Qui le contrôle et où va l'argent? Comment les vendeurs sont-ils recrutés?
Il y a sûrement quelque part un « prince des mendiants ».

lundi 8 avril 2013

L'incorruptible

Sept ans après Gomorra, qui a connu un immense succès international, Roberto Saviano publie ZeroZeroZero, un roman-réalité qui parle du trafic de la cocaïne dans le monde. La cocaïne est l'affaire la plus lucrative sur la planète et l'une des plus destructrices par ce qu'elle génère de criminalité, de corruption et, bien entendu, de dépendance.
Saviano a écrit Gomorra quand il avait 26 ans et qu'il parcourait la Campanie (http://www.campanie-campania.net/) à scooter. Il a démonté les mécanismes de la Camorra, la mafia napolitaine, et ses secteurs d'activité (trafic d'armes et de drogues, extorsion, immigrants clandestins, déchets toxiques, etc.) à un point tel qu'il est devenu pour elle un ennemi à abattre. Il vit donc depuis sept ans caché, sous escorte policière 24 heures sur 24, sans jamais pouvoir voir ses proches.
Pourtant, il a réussi à écrire son récent livre à la suite d'une enquête internationale très fouillée auprès de repentis, de consommateurs de cocaïne, d'agents infiltrés et de policiers. Toutes ses sources ont été vérifiées et contre-vérifiées. Et comme il nomme des noms d'organisations et de personnes à profusion, il s'est sûrement fait de nombreux nouveaux ennemis.
Le livre « qu'on termine en se sentant très mal et encore plus mal pour son auteur », selon un journaliste qui a interviewé Saviano, a été publié la semaine dernière, à 500 000 exemplaires, ce qui est énorme, tous pays confondus.
(http://bibliobs.nouvelobs.com/essais/20100408.BIB5201/saviano-par-saviano.html)
Comment ne pas faire de parallèles avec nos petits scandales maison : ces rapaces qui sont prêts à tout pour de l'argent et un peu de pouvoir et qui vous regardent en face en disant qu'ils n'ont jamais rien fait de mal et ne connaissent pas la mafia. De temps à autre, il y en a qui se font coincer les...doigts dans la porte, mais d'autres se lèveront pour prendre la place, pour faire tourner la grande roue de la corruption. Il devrait y avoir plus de Saviano dans ce monde et moins de Milioto.

samedi 6 avril 2013

Selon Machiavel (5)

Lu dans Le Devoir du 3 avril une chronique de Francine Pelletier qui dit ceci :

« Au-delà du politicien conservateur soucieux d’imposer son look au pays, il y a en Stephen Harper un grand stratège dont Machiavel, ce grand prince de la fourberie politique, serait fier. En d’autres mots, il n’y a pas que le credo conservateur (réduire les taxes, le déficit, l’interventionnisme d’État et promouvoir la famille) qui compte pour lui. Tout aussi important : garder le pouvoir, en piétinant ses principes s’il le faut. »

Machiavel n'était pas le grand prince de la fourberie politique, mais plutôt un fin observateur, et j'hésiterais beaucoup à dire qu'il serait fier de Stephen Harper. Il n'était pas aussi machiavélique que ce que l'histoire a retenu ou voulu retenir. Et il n'encensait pas non plus le despotisme, mais savait le décrire et le saurait aujourd'hui :

« Alexandre VI ne fit jamais que tromper; il ne pensait pas à autre chose, et il en eut toujours l'occasion et le moyen. Il n'y eut jamais d'homme qui affirmât une chose avec plus d'assurance, qui appuyât sa parole sur plus de serments, et qui les tint avec moins de scrupule : ses tromperies cependant lui réussirent toujours, parce qu'il en connaissait parfaitement l'art. »

D'Alexandre VI à Stephen Harper, il y a plus de 500 ans, mais un tout petit pas. 
 

vendredi 5 avril 2013

Lucca-Pistoia


Église San Michele à Lucca
Retour à Lucca, quatre ans après notre première visite. En apparence, rien n'a changé, si ce n'est notre perception de la ville, devenue à nos yeux beaucoup plus touristique. On nous aborde en anglais, signe indéniable d'une forte présence touristique. L'affichage en anglais est aussi très populaire. La ville a toujours ses belles églises, sa place de l'amphithéâtre et ses remparts qui entourent la ville sur 4 kilomètres et sur lesquels on peut se promener à pied ou à vélo.
Petite visite chez le marchand de vélos Cicli Bizzarri, où j'ai loué mon premier vélo en Italie. Que c'est bien de comprendre ce qu'on vous dit et de pouvoir répondre par autre chose que du charabia.
On peut être déçu ou charmé à nouveau quand on retourne quelques années plus tard dans un lieu qu'on a vu et aimé. Lucca serait plutôt du côté des (petites) déceptions, peut-être parce qu'on a pu voir depuis qu'il existe, en Italie, des villes très agréables qui ne sont pas nécessairement touristiques. Arezzo en est une, bien sûr, et y retourner maintenant, c'est un peu revenir chez nous. Et on ne peut pas être vraiment déçu quand on retourne chez soi. En tout cas, je ne suis jamais déçu quand je retourne à Saint-Denis ou à Montréal.


Pistoia fait justement partie de ces villes qui sont agréables sans être touristiques. Beaucoup d'art, beaucoup d'églises, beaucoup de petites rues et places charmantes, mais aussi une vie normale, qui n'est pas faite que pour plaire aux touristes. Et en plus, on y a mangé des pizzas mémorables. La région est en quelque sorte la pépinière de l'Europe. Sur des kilomètres, que des arbres et arbustes qui aboutiront dans les jardins et parcs italiens, allemands, français, etc.
 


Église San Andrea, chaire sculptée
au XIVe siècle


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Place du Duomo à Pistoia


 
 
 


mercredi 3 avril 2013

Dégel


Il n'y a pas vraiment de rapport entre le titre et le contenu, sauf peut-être que j'ai senti que mes jambes dégelaient après le long hiver. La sortie de 75 kilomètres du jour était ponctuée de quelques montées, dont une jusqu'à Civitella in Val di Chiana, village dont j'ai déjà parlé l'an dernier sans y être allé et qui a été le théâtre, le 29 juin 1944, du massacre de 244 de ses habitants par une division de l'armée allemande qui battait en retraite et voulait se venger d'une attaque contre deux de ses soldats par des partisans. Si j'étais allemand, peut-être n'aurais-je pas osé visiter ce village ou peut-être me serais-je infligé 10 fois la montée d'environ 4 kilomètres qui y mène. Mais même si j'avais été allemand, à quoi bon expier maintenant? Hannah Arendt a dit que la responsabilité (la culpabilité) collective n'existe pas, il n'y a que la somme des responsabilités (culpabilités) individuelles. Jugement commode ou réalisme? Tout ce qu'on peut faire dans un lieu comme celui-là, c'est se recueillir, ne pas oublier et écouter ce que nous disent les arbres et les pierres, même si c'est horrible.

La position surélevée du village ne l'a pas sauvé de la fureur des Allemands. Aujourd'hui, dans les guides touristiques, on dit que de ce village, on a un des plus beaux points de vue sur la région d'Arezzo.
Avant la montée
Vue depuis le village
Pour ceux qui lisent l'italien

 

Et des fleurs pour la fête de Nathalie












lundi 1 avril 2013

Verdure


S'il y a bien un sujet sur lequel l'humain aime exagérer, c'est le temps qu'il fait. Il semblerait donc qu'il pleut depuis octobre en Toscane. On serait porté à le croire quand on voit les champs et les vignes gorgés d'eau et la végétation luxuriante. Castiglion Fiorentino (que l'on voit au fin fond) est un village situé à 12 kilomètres d'Arezzo que j'ai revu avec plaisir aujourd'hui. La montée de 7 kilomètres qui s'y amorce n'est pas trop méchante et le paysage est un enchantement. Ça sent le buis et les branches d'olivier qu'on fait brûler et le regard porte très loin. On en oublie qu'on est en train de monter.
 
 
Première sortie de 50 kilomètres. Le lundi de Pâques, que l'on appelle Pasquetta, presque tout est fermé et il n'y a pas de camions sur les routes. La sainte paix. Comme ici d'ailleurs à Santa Maria delle Grazie, un peu à la sortie d'Arezzo. Au fait, il n'a pas (encore) plu aujourd'hui.