jeudi 26 septembre 2013

Ça l'achève

Quand on commence à voler des heures à la noirceur,
Quand on ne se demande plus quel maillot on va mettre, mais quelle veste,
Quand sortir en cuissard seulement relève de l'inconscience,
Quand on fait du slalom entre les mottes de fumier qui encombrent la bande cyclable,
Quand le vélo commence à faire un bruit de goret qu'on égorge chaque fois qu'on freine,
Quand on commence déjà à penser à la prochaine saison
C'est que ça l'achève, la saison ou le cycliste
Selon la façon dont on prononce
Du nerf, il faut se rendre à 4 000
En attendant, allons tâter du vent aux îles-de-la-Madeleine

samedi 14 septembre 2013

Dans le brouillard

 
 

 
 
 
Il n'y a qu'en imagination, dans les livres (Dany Laferrière) et dans le brouillard qu'on peut voyager aussi facilement. Ce pourrait être la Toscane, un décor de livre (l'Ombre du vent) ou Kamouraska, un frais matin de septembre. 

samedi 7 septembre 2013

Le doux pays (4)


Moins travailler a des avantages, comme profiter d'une belle journée de septembre pour aller embrasser le Kamouraska et Charlevoix, de Tadoussac au Cap Tourmente.
En prime, le chant des grillons, tellement caractéristique de la fin d'été :
http://www.chant-orthoptere.com/

jeudi 5 septembre 2013

Une année

À quoi ça sert un blogue? À s'exprimer? À raconter?

Rockquiroule est souvent sur les routes (3 500 kilomètres au compteur depuis le début de l'année), mais aussi souvent devant son ordinateur à travailler ou, depuis quelque temps, à attendre devant son ordinateur sans en avoir l'air.

Je sens le besoin de m'exprimer sur mon travail depuis un an...après presque 30 ans de carrière. Une carrière tout à fait normale, assez réussie selon les critères propres à notre profession. La dernière année, elle, a été « déroutante », « inquiétante », « dévalorisante », pour moi comme pour bien d’autres collègues.

La traduction a ceci de particulier qu'elle nous permet d'entrer dans des mondes parfois très éloignés de nous, étrangers et étranges à la fois. Celui de la grande entreprise, de l'efficacité d'exploitation, de la rentabilité en est un. J'ai essayé de l'appréhender...de le démasquer, de le traduire et je n'en ai que mieux constaté son implacabilité, sa facilité à encenser les individus puis à les jeter, à les effacer.

La traduction appartient aussi à ce monde, bien que par ricochet, car la grande entreprise n'y sévit guère. Elle y appartient, entre autres, parce que la qualité a depuis longtemps cédé le pas au tarif comme premier critère de sélection d'un fournisseur, sauf dans quelques rares cas et pour certains types de documents.*

Il semble bien que l'âge d'or de la traduction soit révolu. Appelons ça la marchandisation du mot. Si Wal-Mart et Costco peuvent vendre des œuvres littéraires, des logiciels peuvent bien faire le travail des traducteurs et des travailleurs des pays émergents peuvent bien le faire pour beaucoup moins cher.** On peut dire la même chose de beaucoup de professions, de métiers. Nous vivons l'ère de la dévalorisation du travail, du travail bien fait. Ce qui compte, c'est la course au profit. Pourquoi s'échiner à faire un travail respectable quand on peut gagner 10 fois, 20 fois, 100 fois plus en spéculant sur le travail et les biens des autres?

Le marché de la traduction est très fragmenté : tout d'abord, quelques multinationales, grandes adeptes de la technologie, de la traduction véloce et à bas prix, et quelques sociétés mégalomaniaques (« le plus grand nombre de clients », « le plus important cabinet », « le plus ancien », etc.). Il compte aussi une multitude de petits cabinets, qui sont souvent beaucoup plus proches des indépendants que des grandes structures pour ce qui est de leur mode de fonctionnement, de leur philosophie.

Au Canada, ce marché se compose à 35 % de traducteurs indépendants. Qui dit indépendant, dit latitude dans les horaires et les lieux de travail (et je peux dire que j'en ai bien profité), mobilité, mais aussi incertitude et précarité, ce dont j'avais été préservé pendant mes dix premières années de « liberté ». Je sais, le mot précarité ne s’applique guère à mon cas, vu le confort dans lequel je suis installé. C’est la valorisation professionnelle qui devient précaire.

Comme beaucoup d'indépendants, je me suis peut-être isolé; à force de vivre entre quatre murs, j'en ai peut-être frappé un. On finit peut-être par nous oublier à cause de l'absence de contacts (autres que par courriel). Et comme les traducteurs indépendants ne sont généralement pas de très bons promoteurs d'eux-mêmes, ils restent souvent enfermés dans leur mutisme.

Depuis un an, j'ai par moments l'impression de vivre d'expédients, de boucher des trous, de ramasser les miettes (même si elles sont parfois grosses, j'en conviens).

Notre travail, qui n'est déjà pas si valorisant, l'est encore moins s'il devient irrégulier et précaire. Les doutes surgissent, parfois l'incompréhension, la colère. 

Et si les traducteurs indépendants se parlaient et en parlaient?

Et si le ralentissement actuel est un signe qu'il faut commencer à préparer l'après ou le hors-carrière en cultivant ce qui, dans la vie, nous anime vraiment?

 Et c'est là que Rockquiroule redevient Rockquiroule.

En route pour de nouvelles aventures!
 
* « Sauf dans quelques exceptions, comme les documents certifiés et juridiques, les clients accordent moins d’importance à la qualité qu’aux coûts et à la rapidité d’exécution.» (Analyse comparative du Bureau de la traduction. Rapport final. PWC)
 ** « Les organisations se livrent une forte concurrence sur le plan des prix. Presque 80 % des fournisseurs chargent moins de 0,15 $ le mot pour leurs services. » (Idem)