lundi 13 mai 2013

Dans la rue




La Via de Cenci, où nous habitons, fait environ 200 mètres de longueur, deux mètres de largeur dans sa portion la plus étroite et cinq dans sa portion la plus large. C'est une rue qui résume à sa façon l'Italie, dans ses aspects architectural, social et économique.
À l'extrémité la plus large se trouve tout d'abord la gelateria. Le propriétaire, qu'on voit souvent les bras croisés ou en train de fumer une cigarette, à l'entrée de son commerce, a l'air de tout sauf d'un vendeur de crème glacée. Il est peut-être l'un de ces innombrables Italiens qui ne font pas le métier pour lequel ils ont été formés, mais qui se sont accrochés à l'affaire ou au poste qu'ils ont pu trouver. Ceci dit, son affaire marche très bien quand il fait beau.
Juste à côté se trouve la piadineria. Les piadines (http://fr.wikipedia.org/wiki/Piadina) sont un mets typique de la Romagne et sont très populaires. Le midi, surtout, c'est la foule. Les propriétaires, qui se trouvent également à être nos voisins, ont eu une très bonne idée quand ils ont lancé ce commerce (inhabituel pour la Toscane). C'est l'aliment idéal en temps de crise, pas cher (environ 4 $), nourrissant et, en plus, très bon.




 
Tout près de la piadineria, un petit bar tenu par deux filles, Giulia et Robi, qui ont repris cette affaire abandonnée depuis plus de un an. Il leur a fallu du courage - et peut-être l'aide financière de leurs parents ou amis - pour démarrer un commerce en cette période de grisaille. Elles attendent l'autorisation de la ville pour disposer quelques tables supplémentaires à l'extérieur. Ça doit se faire aujourd'hui, mais ça pourrait être tout aussi bien dans trois mois.
Parlant de grisaille, il y a le jeune serveur du restaurant d'en face - l'Osteria de Cenci - qui fait de plus en plus grise mine. Il passe de longues heures dans le cadre de porte à attendre l'hypothétique client et chaque fois que nous sortons dans la rue, il semble se demander pourquoi nous n'allons pas manger là huit fois par jour. Le restaurant a ouvert récemment sur l'emplacement d'un autre, qui a fait faillite. Il est probablement trop cher pour réussir. Mauvaise lecture du marché en somme. Il y avait tout près un magasin de chaussures appelé Lili Marleen, qui a lui aussi fait faillite, au grand désespoir de Nathalie. La Pasticceria (pâtisserie) de Cenci, elle, marche bien; c'est une véritable institution à Arezzo, ce qui permet d'ailleurs à la propriétaire d'arborer un air bête sans que cela nuise aux affaires.


Reste le salon de coiffure où les affaires semblent bien marcher, le cheveu continuant de croître, un magasin de produits de santé qui a un peu l'air de se demander ce qu'il fait là et, dans notre immeuble, un salon de massages finlandais, tenu par Angelo, pilier de la rue et grand fumeur qui aurait déjà été, selon ses dires, un cycliste émérite et qui à chaque fois qu'il me voit revenir à vélo me demande combien de kilomètres j'ai faits et me raconte quelque haut fait de sa « carrière ».

La rue devient parfois très animée le soir à cause du petit bar. Tout le monde est dans la rue quand le temps le permet; ça boit, ça écoute de la musique, ça parle fort et même ça crie parfois, mais ça ne nous dérange guère. Peut-être que nous sommes à l'abri du dérangement ici. Pourtant dérangement il y a. En ce moment même, sur une terrasse située à quelques mètres à peine, il y a le voisin qui joue au ballon avec ses deux enfants, le plus jeune s'époumonant comme un goret chaque fois qu'on lui enlève le ballon pendant que leur oiseau en cage y va de vrilles et de trilles à faire pâlir d'envie une sirène d'ambulance.












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